Décret sur l’activité partielle : procédure simplifiée, meilleur remboursement aux entreprises

Pour aider les entreprises à faire face à l’épidémie de coronavirus, le gouvernement a décidé de réformer le mécanisme d’activité partielle, plus connu sous son ancien nom de « chômage partiel ». Première étape avec un décret paru au JO du 26 mars 2020. Au menu, notamment, un meilleur remboursement des entreprises, une réduction des délais d’instruction et une procédure simplifiée.

Date d’entrée en vigueur du nouveau dispositif

Le dispositif exceptionnel d’activité partielle issu du décret est applicable au titre du placement en position d’activité partielle de salariés depuis le 1er mars 2020.

Où adresser la demande et quand ?

L’employeur doit adresser une demande préalable d’autorisation d’activité partielle au préfet du département où est implanté l’établissement concerné (c. trav. art. R. 5122-2).

Rappelons que la demande se fait par voie dématérialisée sur Internet : http://activitepartielle.emploi.gouv.fr

Le décret prévoit désormais que les circonstances de caractère exceptionnel (ex. : contexte de l’épidémie du coronavirus) font partie des dérogations possibles à la règle de la demande préalable (c. trav. art. R. 5122-3 modifié).

L’employeur a alors 30 jours pour déposer sa demande à compter du placement des salariés en activité partielle.

Pour mémoire, l’autre cas de dérogation à la demande préalable est la suspension d’activité liée à un sinistre ou à des intempéries.

Consultation du CSE

L’employeur doit consulter le comité social et économique (CSE), si l’entreprise en est dotée (c. trav. art. R. 5122-2 modifié).

Cette consultation, obligatoire, est en principe préalable au placement en activité partielle.

Par dérogation, l’employeur n’est plus tenu de consulter le CSE en amont dans deux cas de figure :

- en cas de sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ;
- en cas de circonstance de caractère exceptionnel, dont fait partie l’épidémie actuelle.

Il doit alors préciser, dans sa demande d’activité partielle, la date prévue de consultation du CSE.

L’employeur dispose alors de 2 mois à compter de la demande pour adresser l’avis rendu par le CSE (c. trav. art. R. 5122-2 modifié).

Réponse de l’administration et durée maximale de l’autorisation

En principe, le préfet a 15 jours calendaires suivant la réception de la demande préalable d’autorisation d’activité partielle pour notifier sa décision d’autorisation ou de refus, par voie dématérialisée (c. trav. art. R. 5122-4).

Ce délai de réponse (ou de décision implicite en l’absence de réponse) est réduit à 2 jours jusqu’au 31 décembre 2020, et ce, en quel que soit le cas de recours à l’activité partielle (circonstances exceptionnelles, type épidémie actuelle, ou non) (c. trav. art. R. 5122-4 modifié).

L’autorisation d’activité partielle peut désormais être accordée pour une durée maximale de 12 mois, renouvelable, contre 6 mois auparavant (c. trav. art. R. 5122-9, I modifié).

Rappelons que l’employeur doit indiquer la durée prévisible de sous-activité dans sa demande.

Indemnité d’activité partielle versée par l’employeur au salarié

Le décret ne modifie pas les règles applicables en la matière.

Pour chaque heure indemnisable (heures perdues en dessous de la durée légale du travail ou, lorsqu’elle est inférieure, en dessous de la durée conventionnelle ou contractuelle du travail), l’employeur verse au salarié, à l’échéance de paye, une indemnité d’activité partielle dont le taux horaire est égal à 70 % de la rémunération horaire brute de référence (cas général) (c. trav. art. R. 5122-18).

Pour mémoire, cette rémunération horaire brute de référence est déterminée par référence à la rémunération brute servant d’assiette au calcul de l’indemnité de congés payés calculée selon la règle du maintien du salaire (et non du 1/10e), ramenée à un montant horaire sur la base de la durée légale de travail ou, si elle est inférieure, de la durée collective du travail ou de celle mentionnée dans le contrat de travail (c. trav. art. R. 5122-18, al. 1 renvoyant à L. 3141-24 II).

Ainsi, les primes et autres éléments de salaire entrant dans la base de calcul de l’indemnité de congés payés sont pris en compte pour le calcul des indemnités d’activité partielle à verser aux salariés.

Sur ce point, sans surprise, le décret n’apporte pas de précision. Les praticiens confrontés aux modalités pratiques de prise en compte de certains éléments de rémunération (commissions, etc.) resteront donc sur leur faim (sur ce sujet, lire notre info du 24 mars, « Retour sur quelques grandes interrogations des praticiens et sur le bulletin de paye »). Peut-être que la DGEFP apportera, dans un second temps, des précisions.

Allocation d’activité partielle remboursée à l’employeur plus favorable

L’allocation d’activité partielle remboursée par l’État à l’entreprise n’est plus forfaitaire. Pour mémoire, la réglementation antérieure prévoyait que l’employeur percevait une somme de 7,74 € ou 7,23 € par heure indemnisable selon l’effectif.

Elle couvre désormais 70 % de la rémunération horaire brute du salarié (telle qu’utilisée pour calculer l’indemnité de congés payés) retenue dans la limite de 4,5 SMIC, quel que soit l’effectif de l’entreprise (c. trav. art. R. 5122-12 et D. 5122-13 modifiés).

Cette allocation est au moins égale à 8,03 €, ce qui équivaut au SMIC net à l’heure où nous rédigeons ces lignes. Ce montant plancher permet de couvrir l’indemnisation complémentaire aux indemnités d’activité partielle que les employeurs doivent verser aux salariés au SMIC, ou proches du SMIC, au titre du dispositif dit de la « rémunération mensuelle minimale » (RMM), pour leur garantir le SMIC net. On rappellera que la RMM, actuellement réservée aux salariés à temps plein, devrait être étendue à tout ou partie des salariés à temps partiel par ordonnance à paraître).

Avec ce nouveau système, pour l’employeur qui verse au salarié l’indemnité d’activité partielle au taux de 70 %, le reste à charge pour l’entreprise est donc nul pour les salariés dont la rémunération n’excède pas 4,5 SMIC.

En revanche, si l’employeur verse à ses salariés une indemnité d’un montant supérieur à 70 %, cette part additionnelle n’est pas prise en charge par l’administration.

Pour les salariés payés plus de 4,5 SMIC, l’employeur est bien tenu de les indemniser à 70 %, mais le remboursement sera calculé sur une base plafonnée à 70 % de 4,5 SMIC.

Le décret précise que le minimum de 8,03 € n’est pas applicable aux salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation rémunérés en pourcentage du SMIC. L’allocation remboursée à l’employeur ne peut pas, en effet, être supérieur à l’indemnité versée au salarié (c. trav. art. D. 5122-13).

Salariés au forfait jours et heures sur l’année

Désormais, les salariés en convention de forfait en heures ou en jours sur l’année, peuvent bénéficier de l’activité partielle y inclus lorsque l’activité partielle se traduit par une réduction de l’horaire de travail. Auparavant, ils ne pouvaient en bénéficier qu’en cas de fermeture totale de l’établissement ou d’une partie de l’établissement dont ils relevaient (c. trav. art. R. 5122-8, 2° supprimé).

Le décret précise que dans cette nouvelle hypothèse, le nombre d’heures éligibles à remboursement par l’État est calculé sur la base de la durée légale du travail correspondant aux jours de réduction de l’horaire de travail pratiquée dans l’établissement, à due proportion de cette réduction (c. trav. art. R. 5122-19 modifié). En revanche, le décret n’indique pas comment calculer l’indemnité d’activité partielle que l’employeur doit verser au salarié (ni, d’ailleurs, les modalités de la retenue sur salaire correspondante).

Pour mémoire, en cas de fermeture, on se base sur la durée légale rapportée au nombre de jours de fermeture (2 jours par semaine pendant 3 semaines = 42 h).

Infos du ministère, simulateurs et délai de remboursement

Dans un document de présentation du dispositif exceptionnel du 25 mars 2020 (https://travail-emploi.gouv.fr/emploi/accompagnement-des-mutations-economiques/activite-partielle), il a été indiqué que le simulateur de calcul sera prochainement mis à jour sur le site du ministère du Travail (www.simulateurap.emploi.gouv.fr).

Enfin, soulignons qu’il a été indiqué, dans le document de présentation du dispositif que l’allocation est versée à l’entreprise par l’Agence de service et de paiement (ASP), dans un délai moyen de 12 jours.

Bulletin de paye

L’employeur doit désormais remettre un bulletin de paye avec une ligne spécifique activité partielle, indiquant le nombre d’heures indemnisées, le taux appliqué pour le calcul de l’indemnité horaire reçue par le salarié et les sommes versées au titre de la période considérée (c. trav. art. R. 3243-1 et R. 5122-17 modifié).

Jusqu’à présent, ces informations n’étaient pas, à la lettre des textes, listées dans les mentions obligatoires du bulletin de paye. Le code du travail exigeait simplement qu’elles figurent sur un « document » (c. trav. art. R. 5122-17 dans sa version antérieure au 27.03.2020), qui pouvait prendre la forme d’une annexe au bulletin de paye.

Toutefois, pendant une période de 12 mois à compter du 27 mars 2020 (date d’entrée en vigueur du décret), il est possible de satisfaire à cette obligation comme antérieurement, à savoir en remettant un document annexé au bulletin de salaire.

Et la simplification du régime social ?

Le décret ne contient aucune mesure d’adaptation du régime social des indemnités d’activité partielle. Et pour cause : cette mesure doit intervenir par ordonnance, et non par décret.

Rappelons en effet que la loi d’urgence sanitaire a habilité le gouvernement à adapter provisoirement le régime social de ces indemnités afin de simplifier la mise en œuvre de ces dispositifs (loi 2020-290 du 23 mars 2020, art. 11, b, JO du 24). C’est donc l’ordonnance en cause qui donnera les nouvelles règles.

Qu’est-ce que la rémunération mensuelle minimale ?
• En cas d’activité partielle, le mécanisme de la rémunération mensuelle (RMM) oblige l’employeur à verser au salarié, si nécessaire, une indemnité complémentaire qui s’ajoute aux indemnités d’activité partielle et, éventuellement à la rémunération d’activité résiduelle, pour lui garantir au total le SMIC net des cotisations salariales obligatoires (c. trav. art. L. 3232-1 à L. 3232-7 ; voir RF Paye 291 avril 2019 https://rfpaye.grouperf.com/article/0291/ms/20190228144451915.html).
Concrètement, ce dispositif permet par exemple à un salarié au SMIC en activité partielle de conserver le SMIC net, alors qu’en principe, s’il recevait uniquement les indemnités d’activité partielle, il toucherait moins.
• L’allocation complémentaire versée à ce titre suit le même régime social et fiscal que les indemnités d’activité partielle versées aux salariés.
• À l’heure où nous rédigeons ces lignes, la RMM bénéficie uniquement aux salariés dont la durée du travail est au moins égale à la durée légale du travail (35 h). Elle est calculée sur la base de cette durée légale (151,67 h/mois, pour un salarié mensualisé).
A contrario, les temps partiels et certains autres salariés en sont exclus (ex. : travailleurs temporaires ; VRP, leur salaire n’étant pas fixé en fonction d’une durée du travail) en sont exclus.
Sur ce point, une ordonnance à paraître très prochainement devrait étendre le bénéfice de la RMM, notamment à certains salariés à temps partiel au prorata de leur durée du travail. À suivre...